Mon client décide de créer des espaces d’attente sécurisés (EAS) dans une rénovation complète d’un établissement relevant du code du travail R+1. Est-ce que ces EAS doivent avoir les mêmes caractéristiques qu’en ERP ? Le code du travail ne précise pas clairement les caractéristiques d’un EAS.

Le décret n°2011-1461 du 7 novembre 2011 a modifié le code du travail pour préciser la prise en compte de l’évacuation des personnes handicapées des lieux de travail en cas d’incendie.

Les nouveaux bâtiments, mais aussi les parties rénovées, relevant du code du travail doivent disposer d’un lieu protégé permettant, en cas d’incendie, l’évacuation en deux temps des personnes handicapées dont l’évacuation directe et rapide n’est pas possible. Ces personnes sont ainsi déplacées dans un premier temps vers le lieu protégé puis dans un second temps vers l’extérieur du bâtiment.

Le lieu protégé s’appelle : espace d’attente sécurisé (EAS).

Il s’agit du même terme que celui utilisé dans la réglementation ERP (voir article R 123-7 du CCH).

Annoncé à l’article R. 4214-28,  un arrêté interministériel devait préciser les caractéristiques des espaces d’attente sécurisés et de leurs équivalents, et notamment les règles qui président à leur implanta­tion, à la détermination de leur capacité d’accueil, à leur équipement ainsi que les spécifications techniques auxquelles ils doivent satisfaire en vue d’assurer la protection permettant en cas de sinistre une évacuation dif­férée, lorsque celle-ci est rendue nécessaire, dans des conditions de sécurité maximale.

Malheureusement à la date où sont écrites ces lignes l’arrêté n’est toujours pas paru au journal officiel contrairement à la réglementation ERP où les caractéristiques en matière d’implantation, de capacité d’accueil et d’équipement ont été précisées à l’article CO 59.

Comment alors traiter le dossier objet de la question ?

Tout d’abord, il convient de bien s’assurer qu’il n’y a pas d’autre moyen que de créer des EAS.

Cela se fait en vérifiant 2 points :

1/ Vérifier que le niveau du lieu de travail concerné n’est pas exempté de l’obligation d’être doté d’es­paces d’attente sécurisés ou d’espaces équivalents. C’est tellement évident mais d’après mon expérience il est fréquent que cette étape soit oubliée.

L’article R. 4216-2-3 recense 2 cas d’exonération :

          Lorsque le niveau est situé en rez-de-chaussée et comporte un nombre suffisant de dégage­ments accessibles aux personnes handicapées

          Lorsque le niveau comporte au moins deux compartiments, dont la capacité d’accueil est suffisante eu égard au nombre de personnes handicapées susceptibles d’être présentes. Le passage d’un compartiment à l’autre doit se faire en sécurité en cas d’incendie et être possible quel que soit le handicap. (Peut-être est-ce le cas au R+1 dans notre cas ?)

2/ Vérifier que le niveau du lieu de travail concerné ne se trouve pas dans une configuration considérée comme équivalente à un espace d’attente sécurisé.

L’article R. 4216-2-2 considère 3 cas d’équivalence :

     Les paliers d’un escalier encloisonné dans une cage coupe-feu de degré une heure ou à l’air libre, s’il est équipé de portes coupe-feu de degré une heure ;

      Le local d’attente d’un ascenseur encloisonné dans une cage coupe-feu de degré une heure ou à l’air libre, s’il est équipé de portes coupe-feu de degré une heure ;

          Un espace à l’air libre.

Ces équivalences sont reconnues sous réserve que les différents endroits soient accessi­bles aux personnes en situation de handicap et qu’ils offrent une protection contre les fumées, les flammes, le rayonnement thermique et la ruine du bâtiment pendant une durée minimale d’une heure. Il faut s’assurer que la ruine du bâtiment n’intervienne pas avant l’évacuation des personnes.

Enfin, s’il n’est pas possible de s’affranchir de la création d’EAS alors il est possible de s’inspirer des caractéristiques mentionnées dans la réglementation ERP. Néanmoins l’application des éléments figurant à l’article CO 59 du règlement de sécurité approuvé par l’arrêté du 25 juin 1980 modifié n’est pas obligatoire

Concernant l’implantation et la capacité d’accueil des EAS relavant du Code du travail, l’article R. 4216-2-1 stipule que « Les lieux de travail situés dans les bâtiments neufs ou dans les parties neuves de ces bâtiments sont dotés, à chaque niveau, d’espaces d’attente sécurisés ou d’espaces équivalents, dont le nombre et la capacité d’accueil varient en fonction de la disposition des lieux de travail et de l’effectif des personnes handicapées susceptibles d’être présentes. »

Sur les mêmes sujets, l’article CO 59 est plus précis.

Concernant l’implantation le paragraphe a/ indique que les EAS dans un ERP doivent:

     être au nombre minimum de 2 par niveau où peuvent accéder des personnes circulant en fauteuil roulant. Dans le cas où un seul escalier est exigé, le niveau peut ne disposer que d’un seul espace d’attente sécurisé ;

        être créé à proximité d’un escalier considéré comme dégagement normal au sens de l’article CO 34 (§ 2);

        pouvoir être atteints dans le respect des distances maximales prévues aux articles CO 43 et CO 49 ;

Concernant la capacité d’accueil du niveau, le paragraphe b/ indique que les EAS dans un ERP doivent :

        avoir une superficie cumulée permettant d’accueillir au minimum 2 personnes en fauteuil roulant pour un effectif de public inférieur ou égal à 50 personnes, augmentée d’une personne en fauteuil roulant par tranche de 50 personnes supplémentaires reçues au niveau concerné, tout en maintenant la largeur du dégagement menant à l’issue ;

        chaque espace d’attente sécurisé doit avoir une capacité d’accueil minimale de 2 personnes circulant en fauteuil roulant ;

En matière d’équipement, selon les paragraphes e / et g/

   l’espace d’attente doit être équipé d’un éclairage de sécurité conforme à EC 10 ;

   des consignes sont disposées à l’intérieur de l’espace, bien visibles, rédigées en français et dans les principales langues parlées par les usagers habituels des lieux et conformes aux prescriptions des textes relatifs à l’accessibilité ;

   au moins un extincteur à eau pulvérisée doit être installé dans un espace d’attente sécurisé non situé à l’air libre ;

   au moins un moyen permettant à une personne de signaler sa présence doit être prévu (par exemple une fenêtre, sous réserve qu’elle soit repérable des équipes de secours, téléphone, interphone ou bouton d’appel d’urgence identifié et localisé en cas de présence de service de sécurité).

Le respect de ce qui précède est forcément adapté dans le cadre de la réalisation d’un EAS relevant du Code du travail. Un regard différent peut être porté sur les éléments surlignés. En effet, augmenter la capacité d’accueil du niveau d’une unité par tranche de 50 personnes n’est peut-être pas pertinent dans la mesure où le personnel fréquentant les lieux en fauteuil roulant est normalement connu et vraisemblablement fixe. Avec 2 EAS par niveau d’une capacité d’accueil chacun de 2 personnes circulant en fauteuil roulant (minimum de capacité de la réglementation ERP) le niveau offre une capacité d’accueil déjà intéressante. Mais attention, la capacité d’accueil du niveau a une règle d’or à respecter : elle doit être suffisante eu égard au nombre de personnes handicapées susceptibles d’être présentes (objectif mentionné au 2° de l’article R. 4216-2-3).

En l’absence d’une règle, seule une connaissance précise de la population fréquentant les lieux  ayant des difficultés de déplacement pour utiliser un escalier permet de dimensionner les capacités d’accueil à prévoir pour l’ensemble des EAS d’un niveau.

Le lecteur est informé que la réponse donnée ci-dessus l’est uniquement à titre consultatif.